Le CONGO est-il situationniste ? : 20 ans d'histoire politique de la classe dirigeante congolaise par Dominique DESJEUX

Publié le par CERBAC

PARTIE III

Lu pour vous......

 

MISE AU PLACARD DES PERES DE LA “RÉVOLUTION“DES 13,14,15 Aout1963

 

 En 1976, le « Père de la Révolution », vieux syndicaliste C.G.T., est sur une voie de garage, comme inspecteur du travail. Un autre leader, Matsika, vit en exil en France. Gilbert Pongault, secrétaire général de l'Union Panafricaine des Travailleurs Croyants, en 1963, est exclu du Comité Central de la M.N.R. en 1965, puis au cours d'un procès en 1966, il est condamné à mort, mais non exécuté. Ils ont été éliminés par l'aile gauche du mouvement, au nom de la pureté révolutionnaire. Elle était représentée par des hommes tels que André Hombessa, Martin Mberi, Pascal Lissouba, Claude-Ernest Ndalla, Ambroise Noumazalaye, Ange Diawara. C.f   : LE MOIS EN AFRIQUE 21 Page 5 sur 25 Page 6 sur 25

Ils sont aujourd'hui en exil, morts ou à des postes potiches au Congo, au nom de la « radicalisation » de la révolution. Face à la pression de la rue et à l'abandon de la France, contrairement à ce qu'elle fera pour Léon Mba, du Gabon, quelques mois plus tard, F. Youlou démissionne. Mais il se rend à l'armée et non aux syndicalistes, qui voient ainsi leur victoire leur échapper. Le commandant Mouzabakany, alors chef d'état-major de l'armée, reçoit la démission de Youlou. Ce militaire, devenu un des premiers colonels du Congo, aura un avenir en dent de scie, comme la plupart des leaders congolais. En 1966, il est condamné à mort, mais la peine n'est pas appliquée. En 1968, il réapparaît comme ministre de l'Intérieur d'Alfred Raoul dans le gouvernement provisoire qui suit la chute de Massamba-Débat. En 1969, il est dégradé et condamné à une peine sévère de prison. Il est libéré en novembre 1973 au moment de l'amnistie générale. En 1978, il est impliqué dans l'assassinat du président Ngouabi. Youlou est enfermé par l'armée au « camp du Tchad ». Il réussira, grâce à des complicités nombreuses, à s'enfuir au Zaïre, en face. Il mourra en exil à Madrid, en 1972, non sans avoir suscité des mouvements d'opposition youliste entre 1963 et 1970. Il est remplacé par Massamba-Débat qui devient chef d'un gouvernement de techniciens. Il a 39 ans. Il est instituteur et protestant. En 1959, il a été élu comme député U.D.D.I.A. II devient Président de l'Assemblée Nationale. Il entre dans le gouvernement de Youlou. En janvier 1963, il démissionne pour s'opposer à la politique de Youlou. Il a une image d'homme honnête. Il sera renversé en 68 par une coalition de civils et de militaires. En novembre 1969, il passe devant une cour révolutionnaire. Il est seulement condamné à une interdiction de toute activité politique. En 1977, il est arrêté aussitôt après la mort de Ngouabi, condamné en huis clos et exécuté, tôt le matin, le 25 mars. En attendant, il est élu Président le 20 décembre 1963. Il désigne Lissouba pour former le nouveau gouvernement. La période qui s'étend d'août 1963 à juillet 1968, est celle de la lutte de la gauche du mouvement révolutionnaire contre les « modérés » et les militaires, pour l'organisation d'un mouvement de masse et d'une économie socialiste, c'est aussi celle de son échec en tant que mouvement populaire. Avec la création du P.C.T. et l'arrivée des militaires entre 1968 et 1969, les luttes politiques vont se déplacer vers les coulisses des sommets de l'Etat. 3. Le réveil des militaires. Dès la chute de Youlou est institué un Conseil National de la Révolution. En 1964, est créé le M.N.R. (Mouvement National de la Révolution) qui devient officiellement parti unique, la même année. Son Comité central sera le lieu d'enjeux politiques importants. Page 6 sur 25 Page 7 sur 25 22 Revue d'études politiques et économiques africaines Le M.N.R. est un front de transition. Il comprend des anciens éléments du régime youliste, des syndicalistes, des intellectuels revenus de France, des Congolais progressistes restés au pays. Le M.N.R. représente une forme de compromis autour d'un certain nombre de thèmes : luttes anti-impérialistes, ouverture vers les pays socialistes, dénonciation de l'appareil d'Etat néocolonial et de la bourgeoisie bureaucratique, évacuation des militaires français, laïcisation et nationalisation de l'enseignement, construction d'un réseau industriel, agricole et commercial d'Etat, « unification » des mouvements de masses avec la création de la C.S.C. (Confédération Syndicale Congolaise), de la J.M.N.R. (Jeunesse du Mouvement National de la Révolution) et de l'U.R.F.C. pour les femmes (cf. Bertrand). La fraction la plus radicale du mouvement se trouve dans la jeunesse. Une partie de celle-ci a été influencée par le groupe « Basali ba Congo », de Claude- Ernest Ndalla, dit Ndala « graille », et de Noumazalaye. Ils fondent un journal « Dipanda » (Indépendance) qui est très radical. La violence du mouvement n'ira pas sans bavure. Trois hauts fonctionnaires, dont le Président de la Cour suprême et le Procureur de la République disparaîtront en 1965 et seront retrouvés mutilés quelques jours plus tard, dans des conditions non encore éclaircies. Cette violence fait écho aux nombreuses tentatives youlistes de reprendre le pouvoir et aux luttes tribales qui vont secouer l'armée. Elle s'organise autour de la défense civile qui, dirigée par Diawara, vice-président de la J.M.N.R., et encadrée par des instructeurs cubains, tente de former un contre- pouvoir armé face aux militaires et aux attaques des youlistes. Mais l'esprit putschiste et l'autoritarisme l'emporteront sur une stratégie de contrôle populaire. Ange Diawara sera tué en avril 1973, après avoir tenté un coup de main minoritaire contre Ngouabi et instauré un maquis qui a tenu un an, le 22 février 1972. La radicalisation de la gauche va se traduire par une élimination des syndicats chrétiens, par des mesures contre l'armée, une répression anti- youliste et par le développement du discours marxiste. En 1964, la création de la C.S.C., comme syndicat unique entre en opposition avec la volonté des syndicats chrétiens de rester indépendant. Une campagne antireligieuse se développe au nom de la révolution. Des missionnaires sont expulsés. Les écoles religieuses sont nationalisées. Des personnalités religieuses, comme l'abbé Badila, directeur de la Semaine, sont molestés. Les deux leaders syndicaux Kava et Okiemba sont expulsés du gouvernement. André Hombessa, responsable de la défense civile, entre au gouvernement. Il devient ministre de l'Intérieur en 1965. Il est évincé en 1968. Il est aujourd’hui en exil après avoir été condamné à mort par contumace au moment du procès Ngouabi, en 1978. En 1965, Youlou s'échange. Les complots Youlistes se multiplient, notamment celui du 14 juillet 1966, où une trentaine d'hommes tentent un coup de main contre Brazzaville. Ceux-ci vont disparaître.

Cerbac.Info/Cerbac.com

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